A force de
vivre à plus de 3000 mètres, j’en étais venue à penser que c’était normal. Je m’imaginais
que seule la mer pouvait s’apparenter à une terre du bas. Or, j’ai découvert
lundi dernier que les montagnes avaient des niveaux inférieurs et que l’on
pouvait y descendre… (les voyages ça rend neuh-neuh !).
C’est toujours les
montagnes, mais ça ne ressemble plus du tout aux paysages qui nous entourent
depuis trois mois. Ce n’est plus du tout le même climat. Il
fait chaud et humide. La végétation est tropicale. Bref c’est la jungle. Ca m’a
rappelé les forêts de Côte d’Ivoire ou du Togo.
Pas étonnant
que la communauté afro-bolivienne ait élu domicile dans cette région des Yungas
où les Andes et l’Amazonie se rejoignent.
les banquettes de devant c'est mieux pour les jambes! |
A 9H30, nous
avons réussi à attraper un mini-bus à la parada de la Villa Fatima pour la ville de Coroïco,
située à 1525 mètres d’altitude. Il y a 10 ans, il fallait obligatoirement
emprunter « la Route de la Mort » pour s’y rendre.
pas besoin de légende |
Avec une moyenne
de 300 voyageurs tués par an, elle était connue comme la route la plus dangereuse du
monde. Pour parer à la multitude d’accidents, une autre route bitumée et
sécurisée a été tracée avec des ponts et des tunnels. Aujourd’hui, seuls les
bickers venus du monde entier s’élancent en VTT sur l’ancienne voie, en quête de
frisson.
Ils font la descente et reviennent à La Paz |
Sitôt quittée La Paz, le van s'essouffle à monter jusqu'au col de la Cumbre, situé à 4800 mètres. Là, nous entrons dans d'épais nuages chargés de pluies. C'est l'Islande.
Pas un animal... |
Plus nous
descendons au fond de la vallée, et plus la végétation explose : lianes, fougères, cascades,
bananiers .
Après 2H00 de route, nous arrivons sous le soleil sur la place de
Coroïco.
Sans perdre de temps, nous filons à l’office des guides avant la
fermeture, pour connaître leurs propositions de visite. Nous optons pour
visiter dès l’après-midi le village de Tocana.
Souhaitant poser nos sacs, nous
visitons quelques hôtels. C’est la grosse déception : soit c’est super
luxe à plus de 15 euros la nuit par personne, soit c’est à 5 euros, mais alors c’est
super sale et pourtant je ne suis pas une chochotte !
Au regard des
endroits où l'on a pu dormir depuis trois mois, nous avons la nette impression
que les hôteliers de Coroïco ne font aucun effort pour rendre au minima agréable
le souvenir qu’en garderont les touristes qui y passeront la nuit.
Ne trouvant
rien, et pour ne pas commencer à s’énerver, nous décidons d’une part de manger, et d’autre part de reporter notre quête d’un logement à la soirée. Nous laisserons
nos sacs dans le taxi qui nous conduira au village.
Daniel sera
notre guide. Marié à une afro-bolivienne, il connaît bien l’histoire de cette
communauté et, cerise sur le gâteau, c’est un naturaliste hors pair.
Alors, je vous raconte. Pendant la colonisation espagnole, des milliers d'esclaves noirs en provenance de l'Angola et du Congo sont amenés au Haut-Pérou (Ex Bolivie). Ils travaillent d'abord à Potosi (la plus importante ville de l'Amérique Latine à cette époque), dans les mines d'argent. Ces mines qui ont fait la fortune de l'empire espagnol.
Mais la population noire ne s’adapte pas au climat et à l’altitude élevée de la ville (tu m’étonnes !!) et il y a une forte mortalité.
Mais la population noire ne s’adapte pas au climat et à l’altitude élevée de la ville (tu m’étonnes !!) et il y a une forte mortalité.
Ils sont alors vendus et transportés
dans les Yungas (vallées) pour travailler au champs, notamment dans les champs de coca et de coton.
Tout change avec Evo Morales, 1er président d'origine indienne. il créé en 2009 une constitution pluri-ethnique dans laquelle les Noirs sont enfin reconnus. la communauté afro-bolivienne a désormais ses terres et l'autonomie pour gérer ses affaires. Elle a également son roi.
Le roi actuel |
Don Julio Pinedo, Roi de la communauté
afro-bolivienne, est un descendant direct du premier roi congolais, Uchicho,
venu par erreur en tant qu’esclave. Couronné monarque en 1992, sa figure
institutionnelle est aujourd’hui reconnue par la Constitution Bolivienne et par
les Nations Unies.
Toccata |
Mais
la balade sera sympa. Daniel nous invite à deviner, en froissant des feuilles et
en les humant, l’arbre, le fruit ou l’herbe dont elles proviennent. C’est
amusant et instructif !
Du café |
On en a plein le nez et plein les mirettes. La végétation
luxuriante de Tocana offre toutes sortes d'arbres fruitiers, plantés (ou pas) ça et là.
Rien n’est organisé. On passe de la mandarine à la banane (il y en au moins 5
sortes), au citron doux, au café, au cacao, à l’avocat, à l’orange, au cédra,
et je vous passe les plantes aromatiques et médicinales.
Bananes |
Daniel nous a même
appris à fabriquer du shampoing en malaxant deux herbes entre elles. Super
pratique, si on est un jour perdu en pleine jungle !
Sur le chemin du retour, nous nous arrêtons chez un
gars qui a réalisé ses études d’anthropologie sur le village de Tocana et qui y
est finalement resté. Nous visionnons chez lui un petit documentaire sur le
sujet dans lequel il apparaît en pleine jeunesse.
Puis, après un p’tit verre
nous reprenons la route pour Coroïco. Il est 18 heures. Daniel, nous conduit
jusqu’à une maison qui propose des habitaciones (chambres). La rue est si
pentue qu’il est évident que jamais nous nous y serions aventurés. Rue pentue =
belle vue.
La vista est magnifique. Nous dominons toute la
vallée et apercevons le village de Tocana où nous étions il y a quelques
minutes.
Les chambres sont minimalistes, mais les lits sont confortables. On
accepte, pour 40 Bolivianos par personne. Le jardin de la maison est encombré d’arbres
fruitiers.
Nos deux chambres (enfin leurs portes) |
Les enfants s’amusent à le descendre accompagnés des trois clébards.
Moi, je ne descends que si je suis obligée. La remontée me fait peur.
Celle qui nous attend pour revenir sur la place centrale du village
sera en effet "costaude".
c'est pire que sur cette photo |
En plus, la rue est pavée et ça glisse. Heureusement, notre
respiration est beaucoup plus aisée à cette altitude qu’à La Paz. C’est bon l’oxygène !
Rue de Coroïco |
En nous promenant dans les rues, les enfants découvrent
un petit resto proposant une carte de fondue et raclette !!! Il propose également un goulash qui
persuade définitivement Bertrand de dîner dans ce restaurant nommé « La
casa ». Le propriétaire, un bolivien marié à une allemande, partage sa vie entre Coroïco et Dusseldorf, dans l’attente de vendre son affaire.
Nous passons
une bonne soirée autour d’une fondue bourguignonne, et Bertrand d’un goulash.
Le
soir sur la terrasse de notre auberge, nous découvrons, tout étonnés, des vers
luisants volants…
C’est joli. C’est magique. C’est Ray ! Le ver luisant
cajun de « la princesse et la grenouille ».
Dommage que les nôtres ne chantent pas! |
Le lendemain matin, je suis réveillée par des bruits
bizarres. On dirait des coups de marteau. Quand je sors, je suis face à face avec un drôle d’oiseau au plumage aussi disgracieux que
son chant. Je le chasse.
La vue est magnifique……ment bouchée.
Les pieds sur terre et la tête dans les nuages !
Il n’y a pas de possibilité de prendre le petit-déjeuner
à l’hostal. Il faut le prendre au village. Il faut monter la rue… Monter,
monter, monter, toujours monter. Grrr !
Je réveille
les enfants doucement car ils dorment à poings fermés.
Pas de lait au marché central. Nous nous rabattons
donc dans une pâtisserie pour touristes. C’est cher mais c’est bon. Bertrand souhaite rencontrer un apiculteur. Malheureusement Daniel, qui nous a rejoint sur la
place centrale, nous apprend que cela ne pourra se faire. L’homme est indisponible.
Nous décidons donc de descendre aux « Los Vagantes ».
C’est
un endroit où nous pouvons nous baigner. Il y a également la possibilité d’y
faire du canyoning. En effet, il y a du courant !
Il y en a tellement que
je nage en faisant du surplace et que je n’ose lâcher la main d’Albert de peur
qu’il soit emporté par les eaux.
Ce qui est chouette, ce sont les centaines de
papillons qui volent autour de nous. Il y en a de toutes les tailles et de
toutes les couleurs. Ils sont superbes. Ils sont gracieux.
Cependant, leur
choix de terrain d’atterrissage me laisse supposer que les papillons sont certes
de beaux animaux mais tout de même un peu cracra.
Les chaussures d’Albert et
les couche-culottes ont un point commun : l’odeur ! C’est un fait, les
papillons aiment les mauvaises odeurs.
Il est 14 heures et nous décidons de rentrer pour la soirée à La Paz.
Nous ferons le trajet en sens inverse et les mêmes phénomènes météorologiques
se produiront : chaud, brouillard, nuage, pluie et froid. Nous passerons de
la forêt tropicale à l'Altiplano en seulement une heure.
C’est bien de savoir ce qui existe au niveau
inférieur. Cela rassure. On peut monter, mais on peut toujours descendre. Et c’est pas moins mieux.
"La vie est comme une montagne russe. Il y a des hauts et des bas, mais c'est toi qui décides si tu cries ou si tu profites du voyage"
J'adore!
RépondreSupprimerEn Colombie, on appelle les lucioles "cocuyos", le soir où j'en ai vues, j'ai trouvé cela magique. La jungle tropicale, j'adore.
Je vous embrasse.